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Empire et sa culture «street» remplaceront Archambault sur Sainte-Catherine

Written by on February 10, 2025

Dépouillé de ses livres, disques et instruments de musiques, l’intérieur de l’ancien magasin Archambault, à l’angle de Sainte-Catherine et de Berri, révèle ses colonnes de briques et sa disposition peu conventionnelle. « Ce local-là est vide… et est cool », lâche Philippe Grisé, copropriétaire des boutiques Empire et nouveau locataire des lieux. Son commerce spécialisé dans les vêtements et les accessoires de planche à roulettes et de planche à neige reprendra ainsi la place laissée vacante dans ce bâtiment iconique du centre-ville en insistant sur le côté « street » des lieux.

L’intérieur de la future boutique va se distinguer des dix autres magasins Empire ouverts principalement dans les banlieues, dit l’homme d’affaires vêtu d’une veste à capuche, de jeans amples et d’une tuque par-dessus ses dreadlocks.

« On est tombés en amour avec l’espace ici, parce que les plafonds sont anormalement bas comparativement aux espaces commerciaux standards d’aujourd’hui. C’est multiétages. En plus de ça, on a le luxe, au rez-de-chaussée, d’être sur deux niveaux. Ça amène une dynamique qui va nous permettre de rendre l’expérience client vraiment différente de ce qu’on fait traditionnellement. »

Des « produits », une « esthétique » et une « offre de service » adaptés à la réalité urbaine du quartier attendront les clients lors de l’ouverture de cette onzième boutique Empire. Le positionnement géographique du local favorise « un genre de concept différent », explique Philippe Grisé. « Nous, on vient du milieu du skate, du snow. On est du style : “On appelle les amis, on se rejoint à la station.” C’est un peu cette mentalité-là qu’on veut ramener pour pouvoir dire aux clients que si tu veux passer quatre heures ici, là, tu vas pouvoir le faire. »

« On va quasiment avoir une enseigne “flânez ici, s’il vous plaît” ! »

Une ambiance de sous-sol ou de loft qui favorise « le contact humain » attend donc les clients à l’ouverture prévue au début du mois d’août, promet-il. « Tout ce qui rappelle les grandes surfaces, on n’en veut pas. »

Il n’y aura pas d’espace pour tester sa nouvelle planche à roulettes dans la boutique. Ce n’est pas pour autant que l’endroit ne sera pas animé. Sans tout révéler, Phillipe Grisé parle d’« activation » de certains produits « dans le but de se rapprocher de nos communautés ».

« On est capables de coexister là-dedans »

Le quartier où s’installe Empire est plutôt mal en point, surtout depuis les années de pandémie. Il semble toutefois reprendre du mieux alors que des chantiers majeurs de logements et de commerces apparaissent dans le secteur. Phillipe Grisé se dit à « 100 % sûr » que le meilleur est à venir pour le centre-ville de Montréal.

« Entre ma première visite [du local] en 2023 et aujourd’hui, j’ai déjà vu une amélioration. »

La pauvreté qui afflige le quartier reste pourtant difficile à ignorer. Les anciens locataires avaient prétexté « la détérioration croissante des perspectives commerciales dans le secteur de la place Émilie-Gamelin » pour justifier leur fermeture.

Les voisins itinérants n’effraient pas outre mesure le copropriétaire d’Empire. Après tout, son entreprise est branchée sur les cultures de rue depuis ses tout débuts. Le parc Émilie-Gamelin est peut-être fréquenté par des sans-abri, mais aussi par des skateurs l’été et des snowboardeurs l’hiver, fait-il remarquer. « Nous, on est capables de coexister là-dedans. Et on ne juge pas. »

L’est de Montréal est rempli de clients potentiels, tout comme l’UQAM, située juste à côté, et le CHUM, posé pas très loin. Il sera possible d’entrer dans la nouvelle boutique avec son chien, dévoile-t-il encore. « Vole-moi pas, respecte l’établissement, et ça va bien aller. »

Les étages supérieurs du bâtiment emblématique inauguré en 1930 seront par ailleurs occupés par l’Université du Québec à Montréal.

Ce reportage bénéficie du soutien de l’Initiative de journalisme local, financée par le gouvernement du Canada.

Jean-Louis Bordeleau, Le Devoir, Initiative de journalisme local, Le Devoir